mercredi 10 février 2010

Nouveaux soupçons autour de liens entre l'ancien parti de Berlusconi et la mafia

LEMONDE.FR | 09.02.10

Appelé à témoigner au procès d'un général carabinier accusé de complicité avec la mafia, Massimo Ciancimino, fils de l'ancien maire mafieux de Palerme, a affirmé à la barre, lundi 8 février 2010, que Forza Italia, le premier parti de Silvio Berlusconi, "était le fruit des tractations entre l'Etat et la mafia".

Ce n'est pas la première fois que l'on soupçonne un lien entre Silvio Berlusconi et la mafia : au début décembre 2009, un autre repenti, Gaspare Spatuzza, a affirmé que l'actuel président du conseil et son ancien bras droit Marcello Dell'Utri avaient été les interlocuteurs politiques de Cosa Nostra lors de la campagne d'attentats à la bombe de 1993 (deux à Rome, un à Florence, un autre à Milan).

Antonino Giuffre, ex-numéro deux de Cosa Nostra, avait, lui, évoqué, au début de 2003, lors du premier procès de Marcello Dell'Utri, l'existence d'un "pacte" avec Forza Italia : en l'échange d'un engagement de la mafia à faire élire ses candidats – le parti devait permettre la révision des grands procès anti-mafia – abolir la loi portant sur la saisie des biens mafieux et assouplir le régime pénitentiaire des membres de Cosa Nostra sous les verrous.

Crée à la fin de 1993, Forza Italia remporta les législatives dès 1994, et Silvio Berlusconi prit la tête du gouvernement. Mais une première enquête du parquet de Florence sur d'éventuels contacts entre le parti du Cavaliere et la mafia avant ces élections n'a pas débouché et fut classée sans suite en 1998.

RESPECTER LE PACTE CONCLU

Massimo Ciancimino est le fils de Vito Ciancimino, maire de Palerme dans les années 1970, qui faisait le lien entre le pouvoir et les clans siciliens. Secrétaire de son père, il fut le témoin des compromissions entre l'Etat italien et Cosa Nostra.

"En 1994, a raconté Massimo Ciancimino lundi, Bernardo Provenzano [le parrain qui succédait à Toto Riiana, arrêté en 1993, ndlr] me fit parvenir une lettre destinée à Dell'Utri et Berlusconi pour que je la transmette à mon père, qui était en prison. Mon père m'a confié que le document appelait Berlusconi et Dell'Utri à respecter le pacte conclu. Et il a précisé que Forza Italia était né d'un accord passé entre l'Etat et la mafia en 1992."

Ciancimino a également présenté à la Cour un message codé écrit par Provenzano à l'attention de Berlusconi, dans lequel le mafieux aurait menacé le Cavaliere d'éventuelles représailles contre son fils Piersilvio en cas de trahison.

Lundi, l'avocat de Silvio Berlusconi, Niccolo Ghedini, a vivement réagi aux déclarations de Ciancimino, les jugeant "invraisemblables et privées de tout fondement".

"Il semble qu'on veuille délégitimer le gouvernement Berlusconi, qui mène la bataille la plus forte et dure contre la mafia depuis la fin de la seconde guerre mondiale", a-t-il ajouté.

Fabrizzio Cicchitto, président des députés du Peuple de la liberté, le nouveau parti de Silvio Berlusconi, évoque, lui, "De Spatuzza à Ciancimino junior", "une utilisation flagrante évidente de la justice à des fins électorales (...) afin que partout dans les journaux on lise 'Forza Italia - Mafia".

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