Le Monde, 31 janvier 2011
L'ancien ministre de la défense François Léotard va témoigner, lundi 31 janvier, devant le juge Marc Trévidic de ses convictions sur les circonstances de l'attentat de Karachi en 2002, qu'il lie à l'arrêt du versement de commissions décidé par Jacques Chirac et à un contrat avec l'Inde.
M. Léotard fut un homme clé, en tant que ministre de la défense d'Edouard Balladur, des négociations du contrat franco-pakistanais Agosta de vente de sous-marins en 1994, sur lequel Jacques Chirac a ordonné l'arrêt du versement de commissions dès son arrivée à l'Elysée en 1995.
Dans une tribune publiée dimanche par Rue89, l'ancien ministre affirme que "l'attentat de Karachi a été directement provoqué par deux éléments qui se sont conjugués" : "l'arrêt des commissions" et "la vente à l'Inde par le gouvernement français de sous-marins plus performants que ceux qui avaient été livrés au Pakistan auparavant, contrairement aux engagements pris". Selon lui, Jacques Chirac, Dominique de Villepin (alors secrétaire général de l'Elysée) et Charles Millon (ministre de la défense) ont fait preuve d'une "grande légèreté" en stoppant ces commissions.
REPRÉSAILLES
L'ancien ministre, entendu en décembre 2009 par la mission parlementaire sur l'attentat de Karachi, avait donné son "sentiment personnel" d'un lien entre l'arrêt de ces commissions et l'attaque qui avait coûté la vie à onze salariés de la Direction des constructions navales le 8 mai 2002. Le juge Trévidic a réorienté en 2009 ses investigations vers la piste de représailles à la suite de commissions non versées.
Le ministre pourrait aussi fournir un éclairage sur les éventuelles rétrocommissions à des personnalités politiques, des témoignages au dossier évoquant le financement de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995. Devant les parlementaires, M. Léotard avait écarté l'existence de malversations financières, assurant qu'"Edouard Balladur était intransigeant sur le respect de la légalité et des procédures".
PARTIE CIVILE
Parallèlement, la cour d'appel de Paris s'est prononcée contre le souhait des familles des victimes de l'attentat qui voulaient se constituer parties civiles dans les investigations financières du juge Van Ruymbeke. "Si les parties civiles invoquent un préjudice personnel, ce préjudice est indirect, et l'analyse qui est faite sur ce point par le juge d'instruction ne peut pas être approuvée", indique la chambre de l'instruction dans son arrêt. Selon la cour d'appel de Paris, "le préjudice personnel allégué par les parties civiles n'est pas directement causé par les délits d'abus de biens sociaux".
"Nous allons nous pourvoir en cassation contre cet arrêt", a aussitôt réagi Me Olivier Morice, avocat des parties civiles.
lundi 31 janvier 2011
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