mercredi 16 juin 2010

Attentat de Karachi : l’homme qui fait peur au pouvoir

Le Parisien, 16 juin 2010

Jean-Marie Boivin, l’homme de l’ombre du contrat de vente d’armes au Pakistan, est convoqué aujourd’hui par les juges. Il aurait joué un rôle dans le financement de la campagne d’Edouard Balladur.

Homme clé des circuits financiers occultes, âme damnée de la Direction des constructions navales (DCN), chef d’orchestre de la grande valse des millions distribués en marge des contrats d’armement, Jean-Marie Boivin, 56 ans, est convoqué aujourd’hui par les juges financiers Françoise Desset et Jean-Christophe Hullin en vue d’une éventuelle mise en examen.

Mais nul ne sait s’il fera le déplacement. « S’il vient, il ne dira rien, pronostique déjà une source proche du dossier. Ce n’est pas dans son intérêt. »

Patron d’une myriade de sociétés offshore par lesquelles transitait l’argent noir des contrats, les confidences de Jean-Marie Boivin ont de quoi inquiéter au plus haut sommet de l’Etat.

La création en 1993 de la principale de ces structures, Heine SA, n’a pu se faire sans l’aval de Nicolas Sarkozy, alors ministre du Budget. Sorte de « centrale de distribution des commissions », selon un spécialiste de la criminalité financière, cette petite société fait de Jean-Marie Boivin l’interface entre la DCN et ses intermédiaires chargés, sur place, d’emporter les marchés. En marge du contrat Agosta signé avec le Pakistan, Heine SA aurait également joué un rôle dans le financement de la campagne d’Edouard Balladur en 1995, avec le versement des rétrocommissions.

L’étau judiciaire se resserre

Entendu une première fois par le juge antiterroriste Marc Trévidic, Boivin a minimisé son rôle. « Je ne voyais pas les contrats, je ne négociais pas non plus avec les intermédiaires, mais je me doutais bien que les sommes qui passaient par le Luxembourg étaient en lien avec les contrats précédemment signés par la DCNI », a-t-il indiqué en octobre dernier.

L’enquête des juges Desset et Hullin, que le parquet veut limiter à d’éventuels « abus de biens sociaux », permettra-t-elle d’en savoir plus? Une chose est sûre : l’étau judiciaire, peu à peu, se resserre. Jeudi dernier, des policiers financiers ont ainsi perquisitionné au domicile parisien de Ziad Takieddine, l’un des intermédiaires du contrat Agosta.

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