Le Monde, 17 novembre 2010
Une question demeure : pourquoi le Conseil constitutionnel a-t-il validé les comptes de campagne d'Edouard Balladur si ceux-ci étaient entachés d'irrégularités ? Le juge Trévidic demande à consulter les archives des délibérations. Mais Jean-Louis Debré, l'actuel président du Conseil constitutionnel, renâcle. A une première requête de l'avocat des victimes, Me Morice, qui souhaite organiser une rencontre entre elles et lui début octobre 2010, il répond par la négative. Il explique par ailleurs au Monde qu'il "faudrait [qu'il y ait] une bonne raison pour rapatrier les archives" des délibérations de 1995. "Donc, en l'état, je ne vois pas comment tirer les choses au clair", conclut M. Debré.
Début novembre 2010, Jean-Louis Debré refuse une nouvelle fois de divulguer le contenus des débats, cette fois au juge Van Ruymbeke. Dans un courrier, il lui oppose le "secret qui s'attache aux délibérations" du Conseil constitutionnel, s'appuyant sur l'article 63 de la Constitution pour estimer qu'il faut attendre vingt-cinq ans avant de rendre publics les débats entre les "sages". Michèle Alliot-Marie, alors garde des sceaux, a pourtant garanti, à l'Assemblée, que le juge pourrait consulter ces archives.
Interrogé par Le Monde, Roland Dumas, le président socialiste du Conseil constitutionnel en 1995, ne semble pas, quant à lui, se rappeler de cet épisode troublant : "Je n'ai pas le souvenir d'avoir infirmé le rapport des rapporteurs, assure-t-il au Monde. Je ne me souviens pas qu'il y ait eu le moindre problème sur les comptes de campagne de M. Balladur, comme je ne me rappelle pas que leur rejet ait été préconisé. Pourtant, j'étais quand même dans l'opposition à cette époque..."
Même opacité du côté de l'Assemblée : Lorsque Marc Trévidic demande à consulter les auditions de la commission d'enquête de Bernard Cazeneuve, le président de la commission de la défense, l'UMP Guy Tessier, refuse sèchement. Le juge se tourne alors vers Bernard Accoyer. Mais le président de l'Assemblée nationale refuse à son tour, arguant de la "séparation des pouvoirs" et de la confidentialité de ces auditions. Une plainte a été déposée contre lui par les familles de victimes pour "entrave à la justice".
Par ailleurs, Mediapart affirme, début novembre 2010, que les deux journalistes qui travaillent sur le dossier Karachi ont été "géolocalisés" et mis sous surveillance par la Direction centrale du renseignement intérieur.
Face à cette opacité, les familles de victime adoptent une stratégie : engager des plaintes tous azimuts contre les responsables politique de l'époque pour faire éclater la vérité. Elles portent ainsi plainte, suite au témoignage de Michel Mazens (voir épisode 2), qui a confirmé le rôle de Jacques Chirac et Dominique de Villepin dans l'arrêt du versement des commissions, contre les deux hommes, pour "homicide involontaire" et "mise en danger de la vie d'autrui".
Enfin, François Fillon a refusé au juge Renaud Van Ruymbeke l'autorisation de perquisitionner les locaux de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) dans le cadre de cette enquête.
mercredi 17 novembre 2010
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