Le Monde, 26 avrill 2010
La campagne présidentielle d'Edouard Balladur de 1995 aurait reçu 10 millions de francs qui pourraient provenir de commissions versées sur un contrat de vente de sous-marins au Pakistan, auquel s'intéresse un juge antiterroriste enquêtant sur l'attentat de Karachi en 2002, avance Libération, lundi 26 avril.
Selon le quotidien, le 26 avril 1995, l'Association pour le financement de la campagne d'Edouard Balladur (Aficeb) a encaissé dans une agence du Crédit du Nord à Paris 10 millions de francs en espèces (1,5 million d'euros), soit près de 20 % de l'ensemble des recettes mentionnées dans les comptes de campagne d'Edouard Balladur. "Sur le bordereau bancaire, il a été mentionné que l'argent provenait de collectes effectuées lors des meetings électoraux", relève le quotidien, qui s'étonne que "la moitié de ces 10 millions a été apportée en grosses coupures de 500 francs".
Ce versement est intervenu alors qu'entre janvier et juin 1995, deux intermédiaires du contrat Agosta pour le versement de ces commissions ont perçu 184 millions de francs, affirme Libération, qui s'est procuré le contrat Agosta et l'accord entre DCN et Mercor Finance, société off-shore représentant les deux intermédiaires.
Or, selon des témoignages d'anciens de la branche internationale de DCN versés au dossier, ces deux hommes — Ziad Takieddine et Abdulrahman El Assir — ont été imposés en 1994 comme intermédiaires dans le contrat par "le pouvoir politique", en l'occurrence Renaud Donnedieu de Vabres, lequel était à l'époque chargé de mission auprès du ministre de la défense, François Léotard. Tous deux avaient pris parti pour Edouard Balladur face à Jacques Chirac pour la présidentielle.
BALLADUR : "PARFAITEMENT INFONDÉES"
Selon plusieurs rapports et témoignages versés au dossier, ces commissions, à l'époque légales, pourraient avoir donné lieu à des rétrocommissions illégales mais non prouvées à ce stade. M. Balladur a ces derniers mois jugé "parfaitement infondées" les allégations d'un financement occulte, son ancien directeur de campagne, Nicolas Sarkozy, trouvant pour sa part "grotesque" cette "fable". Les policiers ont trouvé en 2007 à la DCN une note mentionnant l'aval pour la création d'une société off-shore — baptisée "Heine" – et par laquelle transitaient les commissions du contrat Agosta du directeur de cabinet de M. Balladur à Matignon, Nicolas Bazire, et de celui du ministre du budget d'alors, Nicolas Sarkozy.
Le parquet de Paris a ouvert début février une enquête préliminaire à la suite d'une plainte des familles des victimes de l'attentat pour entrave à la justice et pour corruption, notamment contre le club politique présidé par M. Balladur. L'enquête sur cet attentat qui fit quatorze morts, dont onze salariés de la Direction des constructions navales (DCN) le 8 mai 2002 à Karachi, a longtemps privilégié la piste Al-Qaida, mais le juge Marc Trévidic l'a réorientée vers l'hypothèse de représailles pakistanaises après l'arrêt des versements de commissions attachées à ce contrat — signé en 1994 et baptisé "Agosta" — décidé par Jacques Chirac après son élection en 1995.
Les familles considèrent qu'elles ont "été trompées par l'Etat français et par plusieurs dirigeants politiques français et pakistanais de premier plan, que leurs proches ont été exposés et tués à la suite d'une sordide affaire de financement politique illicite", avait alors expliqué leur avocat Me Olivier Morice, pour qui Nicolas Sarkozy est "au cœur de la corruption".
lundi 26 avril 2010
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