dimanche 25 avril 2010

Sous-marins Agosta au Pakistan: Un parfum de corruption dès la signature du contrat

Le Monde, 24 avril 2010

François Léotard, alors ministre de la défense, avait signé le 21 septembre 1994 avec son homologue pakistanais la commande de trois sous-marins Agosta 90-B à propulsion classique, pour une somme de 5,4 milliards de francs, soit près de 820 millions d'euros.

Il était prévu que le premier sous-marin soit entièrement construit à Cherbourg, le deuxième assemblé au Pakistan, le troisième totalement fabriqué à Karachi, à l'exception de certaines sections sensibles, comme l'appareil de propulsion qui fonctionne à l'oxygène liquide et l'éthanol.

Une parfum de corruption a vite flotté sur le contrat. Le chef d'état-major de la marine pakistanaise, l'amiral Mansour Haq, a été soupçonné d'avoir reçu des pots-de-vin. Il a été extradé des Etats-Unis et sommé de rembourser en février 2002 plus de 6 millions de dollars au Trésor pakistanais.

L'opposition à Islamabad a également accusé Murtaza Bhutto, le frère du premier ministre Benazir Bhutto, et le mari de cette dernière, Asif Ali Zardari, d'avoir touché de gros dessous de table.

L'instruction a depuis établi que les commissions, alors légales, avaient été particulièrement importantes : 10,25 % du marché, payées à hauteur de 4 % par la direction des chantiers navals (DCN) ; 6,25 % (devenus au fil des mois 7,7 %) via la Sofma, la société française des matériels d'armement.

Des critiques s'étaient élevées en France sur la rentabilité du contrat, conclu sous le gouvernement Balladur : la DCN aurait vendu à perte ses sous-marins pour préserver le plan de charge des arsenaux. La Cour des comptes avait indiqué que la DCN avait mal négocié et allait supporter un lourd déficit financier, estimé à 20 % du montant du marché, soit environ 160 millions d'euros.

Plusieurs intervenants mis en cause ont assuré lors de l'instruction que le gouvernement de l'époque avait imposé à la DCN des intermédiaires pour le versement des commissions au Pakistan.

F. J.

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