Le Figaro, 23 avril 2010
Les acteurs des trois affaires jugées reviennent sur ce qu'ils avaient affirmé durant l'enquête.
La Cour de justice de la République (CJR) devait mener le procès de Charles Pasqua. Bien des témoins appelés à sa barre ont davantage instruit celui de son entourage, remettant au goût du jour une hypothèse : le nom du ministre aurait été utilisé en 1994 à l'insu du principal intéressé. «Si des gens proches de moi se réclamaient de moi pour avoir de l'argent, je les aurais remis entre les mains de la police», avait lancé mercredi soir Charles Pasqua, cherchant à faire partager son indignation avec les parlementaires qui le jugent. La cour venait alors de cheminer dans l'incroyable labyrinthe des rapports d'influence de l'affaire GEC-Alsthom.
«Arranger les choses»
Jeudi, le scénario de «Charles Pasqua victime des siens» se répète autour de l'affaire de la Sofremi. Bernard Dubois était le PDG en titre de la société de ventes d'armes dépendant de l'Intérieur dont les commissions seraient successivement allées à Étienne Léandri, Pierre Falcone, Pierre-Philippe Pasqua et Bernard Guillet, alors conseiller diplomatique du ministre. Spontanément et avant les questions de la défense, Bernard Dubois souligne que l'intervention des intermédiaires dans les dossiers retenus par l'accusation était «nécessaire» pour parvenir à «arranger les choses».
Sa déposition est une sorte d'antithèse de l'analyse qu'il avait lui-même livrée durant l'enquête. L'avocat général Yves Charpenel en rappelle les morceaux de choix : «J'ai compris qu'on allait me demander de commissionner Étienne Léandri pour que, par retour de commission, il finance ce que M. Pasqua et son entourage allaient demander», avait dit Dubois au juge Courroye. «Ce sont des mots que vous avez prononcés», assure le magistrat. «Des mots qu'on m'a susurrés», râle Dubois. L'ex-PDG de la Sofremi, condamné dans ce dossier à 3 ans de prison avec sursis, dit avoir vécu une garde à vue et des interrogatoires «pas conformes à l'idée qu'il se faisait de la France».
En fin d'audience, pourtant, c'est cette fois le président de la cour, Henri-Claude Legall, qui lit ses dépositions, tout aussi accablantes et faites en 2005 devant la commission d'instruction de la CJR, c'est-à-dire sans policier de la brigade financière et sans juge Courroye. Le député Warsmann qui incarne parmi les juges de la CJR le rôle de faux candide, s'étonne : «Vous n'êtes pas libre de parler, là ? C'est surprenant.» La Cour s'est cette fois lancée dans le procès des témoins.
jeudi 22 avril 2010
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